Découvrez la réglementation monégasque des crypto-actifs issue de la Loi n°1.528 du 7 juillet 2022. Différences avec MiCA et le droit français, agréments, obligations et perspectives pour les prestataires de services crypto à Monaco.
Un micro-État, une grande ambition numérique
Monaco, avec sa superficie de seulement 2 km², est le deuxième plus petit État au monde après le Vatican. Pourtant, la Principauté se distingue par une place financière dynamique et attractive.
État souverain tiers à l’Union européenne, Monaco n’est pas soumis à la loi Pacte française ni au règlement MiCA (Markets in Crypto-Assets).
Consciente de l’importance économique croissante des crypto-actifs, la Principauté a adopté la Loi n°1.528 du 7 juillet 2022, instaurant un cadre légal pour les prestataires de services sur actifs numériques et crypto-actifs.
Cette loi définit les notions clés (crypto-actifs, actifs numériques, prestataires), encadre les services et introduit des mesures de protection des investisseurs.
Les différences entre le cadre monégasque, le droit français et le règlement MiCA
En France : la notion d’actif numérique
Feu le régime français, via la loi Pacte, reconnaissait la notion d’actif numérique, qui comprenait :
- Les jetons (biens incorporels représentant un droit, transférables via un DEEP) ;
- Toute représentation numérique de valeur utilisée comme moyen d’échange ou stockée électroniquement.
Dans l’Union européenne : la définition de crypto-actif
Le règlement MiCA définit le crypto-actif comme une représentation numérique d’une valeur ou d’un droit pouvant être transférée et stockée électroniquement au moyen d’une technologie de registre distribué (DLT).
À Monaco : deux notions distinctes mais complémentaires
Le droit monégasque retient à la fois les termes actifs numériques et crypto-actifs, en les différenciant :
- Actifs numériques : valeurs, biens ou droits patrimoniaux sous forme numérique (incluant NFT, utility tokens, et actifs financiers virtuels) ;
- Crypto-actifs : catégorie plus large, regroupant actifs numériques et security tokens.
Autrement dit, les crypto-actifs englobent les actifs numériques.
Les agréments pour les prestataires de services à Monaco
Deux types d’agréments distincts
La Loi n°1.528 crée deux niveaux d’agrément :
Agréments délivrés par le Ministre d’État
Pour les services sur actifs numériques (échange, plateforme) et les services de conservation, émission ou exploitation d’une plateforme de crypto-actifs.
Agréments délivrés par la CCAF (Commission de Contrôle des Activités Financières)
Pour les services de placement, exécution d’ordres, réception-transmission d’ordres (RTO) et conseil sur crypto-actifs.
Conditions d’accès et interdictions
- Seules les entreprises de droit monégasque peuvent solliciter un agrément.
- Toute démarche non sollicitée pour offrir ces services à des résidents monégasques est interdite.
Les obligations des prestataires de services crypto à Monaco
Les prestataires doivent :
- Justifier de l’honorabilité et compétence de leurs dirigeants et actionnaires ;
- Respecter les obligations en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme (LCB-FT).
En cas de manquement, des sanctions administratives et pénales peuvent être infligées, allant jusqu’à 90 000 € d’amende.
Une réglementation ambitieuse, encore en attente de mise en œuvre
Malgré l’adoption de ce cadre en 2022, aucun prestataire n’est encore agréé.
Cette absence s’explique par le retard dans l’adoption des textes d’application, générant une incertitude réglementaire qui freine les acteurs et les investisseurs.
La Principauté a concentré ses efforts récents sur la mise en conformité Moneyval en matière de LCB-FT. Toutefois, l’absence de précisions réglementaires nuit à l’attractivité du pays — alors même que Monaco fut précurseur en intégrant dans sa loi les notions de NFT, Metaverse et Avatar.
Perspectives : vers une relance de la régulation crypto à Monaco
Le dernier rapport d’évaluation mutuelle Moneyval salue les progrès réalisés par la Principauté, mais souligne des lacunes sur la Recommandation 15 du GAFI relative aux nouvelles technologies.
Plusieurs pistes prometteuses s’ouvrent :
- Tokenisation immobilière, un levier d’innovation dans un marché immobilier florissant ;
- Intégration de la blockchain dans le service public (identités numériques, transparence, bénéficiaires effectifs) ;
- Adoption du projet de Loi n°1.039 sur l’usage des dispositifs d’enregistrement partagés (blockchain) pour la tokenisation et la gestion numérique des titres ;
- Déploiement d’outils forensic et d’investigation numérique pour tracer les transactions et détecter les fraudes; ou
- Adoption d’un « RGPD monégasque » avec la Loi n°1.565 relative à la protection des donnée personnelles.
Conclusion : un cadre à fort potentiel, mais à concrétiser
Avec la Loi n°1.528, Monaco a posé les fondations d’une régulation crypto ambitieuse et protectrice.
Il reste désormais à la Principauté de publier les textes d’application nécessaires pour transformer cette ambition en atout concret pour son attractivité financière.